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Les minorités géorgiennes dans l’œil du « Rêve Géorgien »

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Le président géorgien, Mikheïl Saakachvili, lance un appel aux leaders européens. Il leur demande de garder un œil sur l’avenir du pays qui se joue en ce moment. En octobre ce sont les législatives, en janvier 2013, les présidentielles. Son principal opposant, le milliardaire Bidzina Ivanishvili jongle entre propos xénophobes, discours conservateur et pointe du doigt les minorités du pays.

 

L’oligarque scinde la Géorgie en deux. Une menace pour l’équilibre social, s’il est élu.

« Cette année est marquée par les élections et nous appelons vivement la communauté internationale, l’Europe, le parlement européen, l’OSCE – Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe – les pays partenaires et ceux de l’alliance, d’envoyer non seulement à court-terme, mais à long-terme aussi, des observateurs, pour surveiller la couverture médiatique géorgienne et les mécanismes de financement des partis, afin d’assurer que l’ensemble du processus électoral est transparent, pas uniquement le jour des élections. »

Saakachvili s’exprimait au siège des Nations Unies en avril dernier pour témoigner de sa volonté d’une élection qu’il veut « exemplaire ». À l’automne, ce sont les élections parlementaires, suivies des présidentielles, début 2013. Et l’enjeu est considérable. Car la population aura le choix, entre d’un côté, un président réformiste, novateur, ouvert sur l’Europe et son marché. De l’autre, un candidat conservateur et rétrograde, dans son désir de renouer avec sa voisine russe, alors que Tbilissi essaie depuis tant d’années de ne plus être un simple « satellite » de l’ex-URSS.

Après le monde des affaires, Ivanishvili s’essaie donc à la politique. L’homme a bien la ferme intention de prendre le pouvoir, avec l’aide de son parti le « Rêve Géorgien ». Prêt à tout, le franco-géorgien ne s’embarrasse pas des bonnes manières. Accusé dans des affaires de corruption, d’achats de voix, etc. Ivanishvili multiplie les coups bas pour gagner en notoriété.

Cette fois-ci donc, le businessman et sa coalition s’en prennent aux minorités du pays. Sur la chaîne géorgienne Mastro, Ivanishvili est interrogé sur une loi accordant davantage de droits aux minorités religieuses. « Selon cette loi, nous aurons un Parlement dont les membres ne seront pas des citoyens géorgiens, ne parleront pas la langue géorgienne et surtout ne seront pas ethniquement géorgiens. »

Et l’oligarque poursuit sur sa lancée dans les colonnes du journal nationaliste Asaval Dasavali, dans lequel il trouve « inacceptable qu’une mosquée puisse être bâtie sur la décision de Mikheïl Saakachvili. » Un discours plus emprunt aux partis extrémistes qu’à un vrai parti d’opposition.

Le chef de file du « Forum National » rattaché au « Rêve Géorgien », Gubaz Sanikidze, souhaite quant à lui connaître les origines « ethniques » de son président. « Je suis en droit de savoir son origine [ethnique]. Si la Géorgie a un président arménien, alors pourquoi quelques personnes se plaignent que les droits des arméniens soient bafoués ? »

Ce même élu a récemment déclaré dans la presse, « en terme de minorités sexuelles, le nombre de pédérastes est bien plus élevé que celui des lesbiennes. Par conséquent, les femmes sont plus résistantes que les hommes. » L’intéressé ne manque pas de préciser « à quel point il est dur pour une femme, elle, le socle de nos gènes et de la famille, de quitter le foyer afin de gagner sa vie […] je ne suis pas un fervent défenseur de l’égalité homme-femme, et il ne le seront jamais d’ailleurs, mais je trouverais toujours normal qu’une femme se lève à la même heure que son mari le matin. »

Enfin, deux autres membres du parti d’Ivanishvili, ont déversé toute leur haine envers les partisans du président et la communauté arménienne. « Il est inacceptable que les églises géorgienne et arménienne aient le même statut. Les arméniens ont plus d’argent, ils vont finir par nous dévorer ! » Explique le premier. « Tout ce qu’ils [les défenseurs du président] connaissent, c’est la langue de Shakespeare et comment utiliser un ordinateur. Ils ne connaissent ni la bravoure, ni la religion. Ils ne sont pas vraiment géorgiens. » Crie le second. Et d’ajouter qu’aucun géorgien ne peut soutenir des « athéistes » et des « impies » comme le président Saakashvili.

À l’aube des élections géorgiennes, Tbilissi se déchire. Bidzina Ivanishvili est prêt à en découdre avec le président en poste et il le fait savoir. L’oligarque ne doit sa notoriété soudaine qu’à la vague populiste qu’il a réussi à impulser grâce aux idées malsaines qu’il diffuse dans les média. Le pays se coupe. Les minorités sont pointées du doigt. Un mouvement se lève dans le Caucase. Le « Rêve Géorgien » continue de grappiller des voix à droite à gauche. Mais à quel prix ?

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La Rédaction