« Doit-on enseigner aux jeunes médecins le toucher vaginal ou rectal sur des patients endormis au bloc ? » Près d’une cinquantaine de médecins, de féministes et de journalistes ont pointé du doigt les méthodes d’enseignements des jeunes médecins concernant les touchées vaginales et rectales sur des patients endormis par l’anesthésie.
La polémique a éclaté lundi dernier suite à un article publié dans le Métronews relayant un document mis en ligne par la Faculté de médecine Lyon Sud Charles-Mérieux. Le était consacré sur un « apprentissage du bloc sur une patiente endormie » et que les méthodes auraient été pratiquées par des étudiants. Doit-on de ce fait s’inquiéter ? Les trois points à savoir pour comprendre la polémique.
Ces pratiques sont-elles courantes ?
Praticien à Lyon-Sud, un médecin cité dans les documents publiés par Metronews dit ne pas « connaître l’existence » de ces pratiques. Les allégations que l’hôpital a également démenties fermement : « Il n’a jamais été organisé de formation sur des patientes endormies (…) Ce n’est pas possible, ce n’est pas éthique, ce serait inacceptable « , explique François Golfier, chef de service de Lyon Sud.
Cependant, différents témoignages racontent l’existence de tels touchers. « Il ne faut pas être hypocrite, tout le monde le fait », explique le chef de service urologie d’un hôpital à Paris à « Pourquoi docteur».
Une ancienne externe raconte également qu’elle avait été « invitée» avec d’autres étudiants à diagnostiquer la prostate d’un malade endormie. « Oui, on pratique les touchers vaginaux sur des patientes endormies », a également écrit sur son blog, un interne en médecine.
Le président du Collège national des gynécologues et obstétriciens a également confirmé l’existence de la pratique dans l’Obs, mais il ne le définit pas comme un « entraînement» mais plutôt comme une « formation» des étudiants « sous la responsabilité du médecin ». « Les étudiants palpent beaucoup mieux les structures lorsque la patiente est anesthésiée, car les muscles sont détendus ».
Les opposants à la pratique pensent qu’elle « fait fi » des consentements des patients. « Négation» des droits du malade. « Le toucher vaginal effectué sans consentement pourrait même être assimilé, au sens pénal, à un acte de pénétration sexuelle commis sur la personne d’autrui par contrainte ou par surprise, c’est-à-dire un viol », annoncent-ils dans leur tribune. Ils exigent que le ministre Marison Touraine et Najt Vallaud-Belkacem « fasse toute la lumière sur cette affaire et les conditions de l’apprentissage pratique des futurs médecins ». Ceux qui ont signé les tribunes souhaitent également le recueil systématique du consentement du malade « sur les actes pratiqués par des étudiants dans l’ensemble des hôpitaux français ».
« L’apprentissage des touchers pelviens et rectaux doit être réalisé dans le respect de la loi, avec interdiction formelle pour un étudiant d’examiner un(e) patient(e) »sans son « consentement éclairé », ni « sans la présence et la supervision d’un enseignant », rétorque le ministère. « Si des infractions étaient avérées, elles seraient inadmissibles et devraient être sanctionnées. » Sur Twitter, la secrétaire d’État chargée des Droits des Femmes, Pascale Boistard, demande « la lumière sur les cas évoqués ».
« Personne ne subira un toucher vaginal s’il vient se faire opérer de l’oreille ou de l’épaule, écrit un interne en médecine sur le blog « Souriez, vous êtes soignés ». C’est bien sûr au cours d’une intervention gynécologique ou urologique que ce geste est important. (…) Dans ces contextes opératoires ce geste est évidemment utile pour la santé de la patiente. »
Le président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français explique que la pratique se fasse sous la surveillance de praticiens expérimentés « Ce type d’examen est pratiqué dans un bloc, avec un anesthésiste autour, une infirmière, explique-t-il. « C’est de la médecine, on n’est pas dans un fantasme de viol !« Bernard Hénon admet que les patients ne sont pas systématiquement prévenus de la pratique, mais il affirme que « faire signer un papier avant cet examen relèverait de la pudibonderie ». « Le corps médical est très respectueux des patients » ajoute-t-il.