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Les industriels de l’agroalimentaire hausse le ton contre la grande distribution

Un an après la lettre adressée à Manuel Valls, Jean-Philippe Girard, président de l’association nationale des industries alimentaires ainsi que 29 organisations représentatives du secteur de l’agroalimentaire accuse la pression de la grande distribution.

 
Le texte dénonce des demandes de baisses de tarifs disproportionnées ou des demandes de compensation de marges rétroactives jusqu’à 2013. L’industrie de l’agroalimentaire affirme également un non-respect de la loi malgré plusieurs contrôles effectués par la DGCCRF. La situation est de plus en plus tendue entre la grande distribution et ses fournisseurs.

 
Quelques semaines suivant la fin des négociations commerciales annuelles, le 1er mars 2015, l’association nationale des industries alimentaires est 29 organisations du secteur agroalimentaire, ont publié le 26 avec 2015 une tribune contre la grande distribution.
Les signataires exigent aux pouvoirs publics de « passer d’urgence à l’action. De sanctionner les abus de manière dissuasive, de renforcer l’arsenal législatif afin de mieux prendre en compte l’évolution du contexte commercial. Après les paroles, place aux actes ! »

 
Le texte circule déjà sur internet depuis quelques jours, par mails et chez les distributeurs. Le lobby des grandes marques ferait pareil aussi sur le même sujet.
Considéré souvent qui un sujet tabou, la guerre de prix entre l’agroalimentaire et la grande distribution a depuis toujours existé. On en parlait entre soi presque à mots couverts, et ce silence de longue durée évoque la qualité du lien entre la grande distribution et les entreprises agroalimentaires.

 
« Pourtant, nous, dirigeants d’entreprise agroalimentaire, tenons à réaffirmer collectivement et individuellement notre engagement et notre fierté de produire et de commercialiser nos produits en France, d’enrichir notre pays et d’y créer des emplois. Aujourd’hui, nous ne pouvons ni ne devons plus nous taire. La défiance entre nos entreprises et nos clients de la grande distribution est devenue contreproductive. L’équilibre du rapport de force s’est effondré à un point tel que l’avenir de la filière alimentaire française, englobant la production agricole et toute notre industrie, la première du pays, est en réel danger. Une concentration excessive des centrales d’achat de la grande distribution détruit l’équilibre sur les négociations commerciales entrainant de nombreuses situations de dépendance économique. »

 
L’Autorité de la concurrence a donné son avis sur le sujet le 1er avril dernier en évoquant « l’existence de pratiques qui appellent à la vigilance», telles «les pratiques de déréférencement» et «les pratiques relatives aux exigences d’avantages sans contreparties ».

 
« Des pratiques que nous subissons tous au quotidien et que nous avons régulièrement dénoncées ! Le bilan des dernières négociations commerciales est édifiant : demandes de baisses de tarifs disproportionnées, demandes de compensation de marges rétroactives jusqu’à 2013, non prises en compte des évolutions des coûts, non-respect de la loi malgré les contrôles plus nombreux de la DGCCRF, et non-respect de nos salariés. Nous ne pouvons pas l’accepter ». « Nous, dirigeants d’entreprise agroalimentaire, adhérons à la volonté de maintenir le pouvoir d’achat des consommateurs et n’hésitons pas à dire la vérité sur la guerre des prix. Elle n’améliorera pas significativement le pouvoir d’achat. Ce mensonge hypocrite a assez duré ! Dans la réalité, la part de l’alimentation dans le budget des ménages n’a fait que se réduire pour représenter aujourd’hui à peine 10%. En 2014, cette guerre des prix entre les enseignes de la distribution a en réalité permis aux consommateurs une économie de quelques dizaines de centimes d’euros par semaine… Pas étonnant qu’ils ne s’en aperçoivent pas. »

 
Mais la guerre des prix, quelles sont ses réelles conséquences? « Dans les entreprises que nous dirigeons, ce sont des budgets de recherche et de développement qui s’amenuisent, des innovations qui se font plus rares, des investissements qui se réduisent, des engagements sociaux et environnementaux plus difficiles à financer. C’est notre capacité à exporter qui est freinée.  »

 
Ainsi, si ce n’est pas l’emploi d’aujourd’hui qui est menacé, ce seront les emplois de demain qui n’existeront pas. Les emplois se font rares et les pouvoirs d’achat diminuent de plus en plus. « Nos entreprises emploient près de 500 000 personnes en France. Nous en sommes très fiers ! Le maintien et le développement de l’emploi constituent la véritable politique honnête et efficace pour améliorer le pouvoir d’achat. »

 
Le système n’est plus utile à qui que ce soit. Agriculteurs, PME, Entreprises de tailles intermédiaires, grandes entreprises, consommateurs, salariés, tout le monde y passe.
« Nous, dirigeants d’entreprise agroalimentaire, sommes fiers de produire et de commercialiser en France, de servir l’Europe et de nourrir le monde. Nous avons en nous la volonté et la capacité de nous développer et d’enrichir notre pays dès lors qu’on nous en laisse la possibilité. » »Nous avons besoin d’être entendus pour retrouver un juste équilibre et préserver nos entreprises, qui font vivre des millions de familles en France. Les 15 789 entreprises agroalimentaires, dont 98% de PME, sont indispensables à notre pays : implantées sur tous les territoires, elles restent bien souvent la seule industrie qui embauche à des kilomètres à la ronde. »

 
« Les pouvoirs publics nous ont beaucoup écoutés. Nous leur demandons aujourd’hui de passer d’urgence à l’action. Nous leur demandons de faire appliquer strictement la loi, de sanctionner les abus de manière dissuasive, de renforcer l’arsenal législatif afin de mieux prendre en compte l’évolution du contexte commercial. Après les paroles, place aux actes ! »

 
« Nous souhaitons que la grande distribution travaille avec nous pour établir ensemble de nouvelles règles sur la base d’un constat commun et partagé. Notre enjeu collectif est de retrouver le sens d’une négociation responsable, garantissant à chacun, au producteur, à l’industriel, au distributeur et au consommateur, un juste prix, une juste rémunération, un juste avenir »

 
« C’est l’intérêt de notre industrie, c’est l’intérêt de notre filière, c’est l’intérêt de la France. »
« Car alimenter, bien alimenter, doit rester notre fierté, notre responsabilité et notre ambition. Ensemble, nous devons et nous pouvons redonner de la valeur à l’alimentation. »

crédits photo: wikipédia

A propos de l'auteur

Stephanie Dumont