Une réflexion du vice-président du syndicat des professionnels de la restauration, l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie), dans une interview au Parisien, a remis sur la table un vieux et éternel débat concernant le pourboire. Celui-ci tend nettement à disparaître, et le vice-président, en prenant pour exemple d’autres pays, se demandait s’il ne fallait pas le rendre obligatoire.
Les plus récentes études montrent qu’en dix ans, la générosité des clients dans les restaurants aurait baissé de 80 %, excepté dans les restaurants de luxe. Les réactions ne se sont pas fait attendre et la violence de certaines prouve, que le sujet est particulièrement sensible. Beaucoup ne voient là, qu’une nouvelle occasion pour les patrons d’établissements de moins payer le personnel.
Du côté des serveurs dans un premier temps, on constate en effet la baisse incontestable des pourboires. « En début de carrière, je doublais mon salaire, aujourd’hui si j’ai 20 euros à la fin du service, c’est un grand maximum« , témoigne José, chef de rang dans un restaurant traditionnel du Ve arrondissement. Certains ne se découragent pas et redoublent d’attention et de gestes pour aller au-delà de la demande des clients afin qu’ils se sentent obligés de mettre la main à la poche.
Cependant, « l’habitude est clairement en voie de disparition », indique Bernard Boutboul, du cabinet Gira Conseil. On impute souvent cette diminution en grande partie à l’utilisation de la carte bancaire, et à la crise qui oblige chacun a compter plus finement. Si ce n’est pas complètement faux, il ne faudrait pas croire que c’est la seule raison.
Tout d’abord, il faut faire la part des choses, car les situations sont très différentes d’un restaurant à l’autre, et même d’un quartier à l’autre. Les employés de cafés et bars ne récoltent que très peu, car les additions sont moins grosses et la clientèle moins aisée. Les salariés des grandes brasseries parisiennes, eux, s’en sortent mieux.
Si les cartes bancaires, plombent l’habitude du pourboire, elles ne sont pas les seules, car on peut citer aussi les notes de frais des repas d’affaires ou les pourboires, qui par définition ne figurent pas sur la facture, et ne sont pas remboursés par les entreprises. Cependant, la raison que l’on n’aime pas évoquer dans la profession, c’est tout simplement que le client n’est souvent que moyennement satisfait du service et du prix exigé pour ce qui lui ait proposé dans son assiette. Le restaurateur parisien Xavier Denamur explique, « ils donnent du prêt-à-manger industriel, servi par un personnel démotivé et souvent épuisé, car en sous-effectif, du coup le rapport qualité-prix ne pousse pas à laisser une gratification« .
On touche là, une facette sombre d’un métier qui propose des emplois qui restent accessibles à tous, même sans diplôme. Cependant, ce métier traîne une mauvaise image notamment avec des conditions de travail difficile, comprenant horaires décalés, travail le week-end, rythme intensif, pénibilité, relation de travail conflictuelle et surtout sans perspective bien déterminée.
La conclusion pour Pascal Brun, ancien président du Groupe Frères Blanc et consultant en hôtellerie et restauration, « le service est toujours compris dans l’addition, mais l’idée de service est loin d’être comprise par tous. »
Crédit photo : Aron Aron