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Guerre 14-18 : le difficile décompte des pertes humaines

Les qualificatifs manquent, lorsque l’on évoque les pertes humaines de la guerre 14-18. La Première Guerre mondiale, dont on célèbre le centenaire de son armistice, a constitué un massacre d’une ampleur sans précédent. Cependant, il est difficile d’obtenir des décomptes précis pour de nombreuses raisons.

La fourchette se positionne de 8,5 à 10 millions de morts, parmi les militaires. Comme on peut l’imaginer, les dégâts parmi les civils sont encore plus compliqués à cerner.

Tout d’abord, il faut considérer que les terribles conditions des batailles de tranchées ont laissé de nombreux corps, qui n’ont pas pu être identifiés. Rien que l’ossuaire de Douaumont, rassemble ainsi les restes de 130 000 soldats inconnus, allemands et français. Il a fallu parfois des années de recherches, pour établir des certificats de décès de certains soldats. Ceux-ci, n’ont donc été délivrés aux familles, que quelques années après la fin de la guerre.

Ensuite, il faut bien avouer, que ce décompte n’était pas une priorité sur le moment. Antoine Prost, professeur d’histoire émérite à Paris-I et spécialiste de la Première Guerre mondiale, explique « sur le moment, les militaires avaient autre chose à faire que compter les morts. Ce qui intéressait les militaires, c’est le nombre de vivants qu’on pouvait envoyer au front. Ils comptaient les pertes, c’est-à-dire à la fois les morts, les prisonniers et les blessés. Par exemple, à Verdun, il y a eu 700 000 pertes, mais seulement 300 000 morts ».

Il faut aussi tenir compte du manque de données de base. La statistique des morts de la guerre, a été arrêtée fin juillet 1918 en Allemagne, et que les derniers mois ont donc été extrapolés. Au Royaume-Uni, les chiffres s’arrêtent aussi au 31 octobre 1918, soit une dizaine de jours avant l’armistice.

Au-delà de ces terribles faits, il y a aussi les catégories et les prises en compte. Un soldat tué au combat est clairement un mort de guerre. La question est plus difficile lorsque l’on parle des prisonniers, qui ont péri dans les camps, ou les soldats morts de maladie, souvent du fait de leur état de grande fatigue ou de séquelles de combat.

Le décompte varie alors, suivant le but recherché. Par exemple, les données des armées écartent le plus souvent les situations ambiguës pour minorer le plus possible le nombre de victimes, surtout durant le conflit et ainsi effrayer le moins possible la population.

Après l’armistice en France, il a bien fallu faire les choses de manière plus précise, pour évaluer le montant des pensions à verser. Les chiffres étaient clairement en dessous de la vérité.

Par contre les Etats-Unis, ont volontairement surestimé leur implication, et le tribut payé au combat, en incluant des victimes de la grippe espagnole. Selon Antoine Prost, « pour les soldats américains, on compte généralement entre 110 000 et 120 000 morts. Mais il y en a 35 000, qui sont morts dans les hôpitaux sans même avoir traversé l’Atlantique ».

Une chose est sûre, l’impact que la guerre a pu avoir sur les différents pays est énorme et ceci à tous les niveaux et dans tous les domaines. Les Européens, ne verront plus les choses de la même manière. Il ne pourrait pas en être autrement lorsque l’on sait, que l’armée allemande a déploré plus de deux millions de morts, autant du côté Russe, tandis que l’Autriche et la France avoisine plus de 1,5 million de morts. Il ne faudrait pas non plus oublier de plus petits pays, dont le sacrifice a été proportionnellement très élevé. Lorsque l’on effectue un ratio entre les pertes militaires et les effectifs mobilisés, c’est la Serbie, qui paie le plus lourd tribut, puisque 37 % de ses soldats ont péri durant le conflit.

Antoine Prost, rappelle sagement, « attention à la fascination du chiffre juste. Souvent, plus les chiffres sont approximatifs, plus ils sont exacts ».

Crédit photo : Alain2139

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La Rédaction