Pour bien comprendre toute l’ampleur du problème des feux qui dévastent l’Amazonie, il faut se projeter encore plus loin dans le temps. En effet, non-content de détruire l’éco-système en place, les zones touchées qui sont transformées dans un premier temps en pâturages, deviennent dans un 2e temps, tout simplement inexploitables.
En effet, les pâturages qui font suite à la déforestation servent à l’élevage extensif de bovins, qui réclament de plus en plus d’espace. Ainsi, les pâturages couvrent 53 millions d’hectares contre 14 millions en 1985. Cependant, Mapbiomas, une plate-forme collaborative réunissant des données scientifiques, financée essentiellement par la Norvège et des fondations privées, expliquent que ses pâturages s’appauvrissent rapidement et les troupeaux sont déplacés vers d’autres territoires. A partir de là, les terres abandonnées sans aucune utilisation, vont mettre des décennies à se reformer.
La fertilité du sol dépend des arbres que l’on brûle
Cette dégradation rapide de la fertilité des sols n’est pas une fatalité. Elle s’explique notamment par la pauvreté des sols en matière organique et en phosphore. Or justement, ce sont les arbres disparus, qui contiennent beaucoup de phosphore. De plus, ils alimentent les sols en nutriments grâce à la décomposition de leurs feuilles et débris. Sans les arbres, l’érosion s’intensifie à cause notamment des eaux de pluie qui emportent les nutriments.
Il faut rajouter à cela, les incendies de l’Amazonie qui provoquent aussi la libération de grandes quantités de carbone, participant au changement climatique et à l’accentuation des périodes de sécheresse, ce qui porte préjudice à l’activité agricole elle-même.
Outre le fait d’arrêter cette déforestation aux avantages locaux très limités dans le temps, au détriment de l’ensemble et du long terme, il faut songer à utiliser et faire renaître les régions dévastées.
Les solutions existent, mais elles ont un coût
Encore une fois, les solutions existent et des méthodes adaptées de plantation ou d’amélioration de la qualité des sols, commencent à être appliquées avec succès. Cependant, tout cela a un coût, et il n’est pas sûr que le gouvernement de Bolsonaro, soit disposé à aider les petits propriétaires terriens à appliquer ses méthodes. Les incitations gouvernementales restent limitées.
Jerônimo Sansevero, chercheur en sciences environnementales à l’Université fédérale rurale de Rio de Janeiro, explique « ces outils permettraient d’intensifier l’élevage, dont la productivité moyenne au Brésil est de 0,8 tête par hectare, sans avoir besoin d’avancer davantage dans la forêt. Mais un éleveur dépense souvent moins en déboisant de nouvelles zones« .
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