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Réchauffement climatique : la fonte de la frontière italo-suisse

Les conséquences du réchauffement climatique, ce n’est pas toujours ailleurs et pour les autres. Les incendies et la canicule actuelle qui sevissent nous le rappelle actuellement. Et puis pour certains endroits très précis, les conséquences sont assez particulières et plus emblématique. C’est le cas d’un refuge construit en Italie. Les aléas du changement climatique ont déplacé la frontière sur le glacier et les deux tiers de la cabane perchée à 3.480 mètres d’altitude se trouvent désormais en Suisse.

Une frontière mouvante suivant la fonte des glaciers

Pour bien comprendre, il faut considérer que sur ses glaciers alpins, la frontière italo-suisse suit la ligne de séparation des eaux. L’écoulement vers le nord marque le territoire suisse, et celui vers le sud, l’Italie. Or, c’est justement cette fonte qui en s’accélérant a laissé place à du terrain et à de la roche. La fonte du glacier du Théodule a perdu un quart de sa masse entre 1973 et 2010. Cela force les deux voisins à redessiner quelques dizaines de mètres de leur frontière. Ce n’est pas véritablement une première car ces ajustements sont fréquents et normalement, ils se règlent en comparant les relevés réalisés par les équipes des deux pays. Cela ne nécessite pas d’intervention politique majeure même s’il faut parfois avoir recours à un échange de territoires de surface et de valeur similaires.

Accords secrets entre l’Italie et la Suisse

Seulement, voilà, cette fois, l’affaire n’est pas si anodine qu’elle n’y parait. À première vue, on discute à propos d’un refuge, celui des Guides du Cervin. Celui-ci assure une prestation classique couvrant le gîte et le couvert pour les passionnés de glisse. Mais il est bon de préciser que l’endroit représente un haut lieu alpin du ski. C’est pour cela que son implantation et son fonctionnement ont fait l’objet d’intenses négociations diplomatiques pendant plus de trois ans. Un compromis a été trouvé l’année dernière. L’affaire est sérieuse, car les détails du compromis restent secrets. Le contenu de l’accord négocié en novembre 2021 ne sera dévoilé qu’après son approbation par les autorités. Côté suisse, le sujet ne pourra être présenté au Conseil fédéral qu’en 2023, au plus tôt.

Des intérêts économiques en jeu

C’est la position stratégique de la bâtisse qui complique les choses. Par exemple, ces années de négociation ont retardé la rénovation du refuge, aucun des villages des deux côtés de la frontière n’étant en mesure de délivrer le permis de construire. En fait, la bâtisse est située à la jonction de Zermatt-Cervinia, une des plus grandes stations de ski au monde. Autour de celle-ci, un vaste projet de modernisation est étudié. Cela comprend, l’ouverture d’un nouveau téléphérique, qui permettra d’accéder au Petit Cervin, un des plus hauts sommets skiables d’Europe (3.883 m) depuis l’Italie fin 2023. À ce sujet, les travaux ne sont pas terminés, mais le goût estimé de l’opération s’élève a 45.8 millions d’euros.

Prévoir le futur

À plus long terme, il s’agit de maintenir à rester les stations les plus prospères de Suisse. Alors que certaines stations de moyenne montagne se préparent à la fin du ski alpin à cause du réchauffement climatique, Zermatt-Cervinia fait durer le plaisir, même si ces activités contribuent à la fonte du glacier. C’est pour ça qu’il faut bien valoriser la zone ici parce que ça sera sûrement la dernière à mourir ».

Je suis rital et je le reste…

En attendant,  le gardien du refuge, Lucio Trucco, 51 ans, a été informé qu’il resterait sur le sol italien. le refuge reste italien parce qu’on a toujours été italien », indique-t-il : « le menu est italien, le vin est italien, et les taxes sont italiennes ».

Pour l’heure, sur les cartes suisses, la frontière entourant le refuge reste en pointillés. Si on peut sourire de cet exemple, il est assez significatif de conséquences locales des dérèglements actuels. Si la tension dans le secteur est avant toute économique, dans d’autres endroits du globe les revendications et les attitudes seront certainement plus conflictuelles et les négociations plus difficiles.

Crédit photo : Angelo Burgener

 

 

 

 

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La Rédaction