49.3, voilà un chiffre qui fait parler, on devrait plutôt dire qu’il fait une nouvelle fois parler. Et pour cause, depuis sa création en 1958, cet article a été mis en avant une centaine de fois. À partir de là, toute la gamme des réactions se met en marche. Du côté de l’opposition, on évoque le « coup de force », la volonté de ne pas écouter le peuple, et même un relent de dictature. Du côté du gouvernement, il s’agit d’efficacité, de bon sens, en évitant de vaines obstructions sans réel but, permise par les procédures parlementaires. Évidemment, les mêmes parlementaires évoquent les mêmes raisons suivantes s’ils sont au pouvoir ou dans l’opposition.
Pourquoi un 49.3
Le 19e siècle en Europe a vu le triomphe des parlements, leur pouvoir politique est alors immense. Trop apparemment 2 conflits mondiaux, de nombreuses crises ont mis à mal les lourdeurs d’un système parlementaire qui s’essouffle. Pour rationaliser ou contraindre les débats et les prises de décisions, le général de Gaulle adopte l’article 49, alinéa 3. Il apparaît à travers la Constitution de la Ve République en 1958. Il veut éviter que les délibérations parlementaires prennent tellement de place que l’exécutif ne soit plus capable de faire passer des décisions.
Mais en fait que dit précisemment la constitution.
Ce fameux article donne la possibilité au Premier ministre après délibération du Conseil des ministres de suspendre les discussions d’un projet de loi en séance publique à l’Assemblée nationale. Le texte est alors adopté, sans passer par un vote. Bien sûr, il y a une limite. Si une motion de censure est adoptée dans les jours qui suivent, le texte est alors rejeté et le gouvernement renversé. C’est pour cela que l’on dit que le gouvernement engage sa confiance.
Une utilisation récurrente
Loin d’une première, ce processus a déjà été utilisé 100 fois depuis sa création. Pas d’exclusivité, on retrouve son utilisation par des gouvernements de gauche et de droite. À chaque fois, même si les camps changent, on retrouve les mêmes arguments pour défendre ou attaquer la méthode. Du coup, tous les gouvernants de tout bord peuvent à la fois détester et adorer cette disposition. Elle a sauvé bien des majorités et permis a de nombreuses lois de passer.
Des lois qui ont utilisé le 49.3 pour s’imposer
Citons par exemple, la loi sur les nationalisations, la loi régissant la liberté de la presse, la liberté de la communication ainsi que le retour à un scrutin majoritaire pour l’élection des députés ou la création du Fonds de solidarité vieillesse. Michel Debré, le père de la Constitution de la Ve République, a inauguré lui-même l’usage du 49.3. Il l’a utilisé notamment pour le texte sur la force de dissuasion nucléaire en 1960.
Record pour Michel Rocard
C’est un Premier ministre socialiste qui a le plus utilisé le 49.3. En l’occurrence Michel Rocard qui a eu, recours 28 fois. Cela lui a permis d’assurer, entre autre, la contribution sociale généralisée , mais aussi la création du Conseil superieur de l’Audiovisuelle ou la réforme du statut de Renault. Au bout du compte, 16 premiers ministres l’ont utilisé depuis 1958.
Notons que lorsque Édouard Balladur l’a utilisé, pour la privatisation d’entreprises publiques, il a fait part de cette remarque. Il a dénoncé une « obstruction parlementaire » menée par l’opposition, qui a déposé près de 4 000 amendements. Voilà qui donne à l’épisode actuel un petit air de déjà vu.
Manœuvre politique contre contestation confuse
Quoiqu’il en soit, c’est surtout le manque de conscencus et une majorité plus ou moins relative qui pousse ou pas, un gouvernement a utilise ce procédé. Il ne s’agit pas de grands idéaux ou de grands principes. C’est plus une manœuvre politique qui fait hélas suite, bien souvent, a une contestation certes forte dans le pays, mais très confuse dans l’hémicycle. Il met surtout en évidence une réelle prise en compte d’un problème, ici le financement des retraites, confronté au flou des solutions ou le manque de courage pour les mettre en place.
Chacun joue sa carte
Comme souvent, on navigue entre une proposition du gouvernement qui est très décrié, et des solutions souvent extrémistes et irréalisables. Au milieu de tout cela, un large spectre de positionnement politique. Dans le meilleur des cas, certains ferment les yeux, se persuadent que tout va bien et qu’il ne faut rien toucher pour ne vexer personne. Et dans le pire des cas, d’autres ne disent presque rien sur un sujet pourtant primordial. Ils le font souvent par limite de compétence, mais par contre se creuse la tête pour savoir comment diriger et exploiter la détresse et la colère pour avancer égoïstement leurs pions.
À qui profite tout cela ?
C’est ce décalage que nos voisins européens ont souvent du mal à comprendre chez nous. Il relève un dialogue politique et social difficile, sur manque de concertation. Une nouvelle fois, un gouvernement utilise la force pour faire passer une loi face à une opinion public hostile. Hélas, cette opinion publique est représentée par des syndicats en perte de vitesse, mais prompt à se mettre en grève et a défiler. Nos voisins pointent aussi des partis politique incapable de se mettre d’accord pour devenir de vrais force de propositions.
Il va falloir encore expliqué que nous somme en République et pas en démocratie
Crédit photo : cover-parlement.