Fin février, les discussions du Parlement européen ont tourné autour de l’interdiction de vente de véhicules à essence et diesel neufs en 2035 dans l’Union européenne. Tout le monde semblait d’accord, jusqu’à que l’Allemagne décide de s’abstenir lors du vote final. Derrière ce revirement, il y a surtout la volonté germanique de placer une condition. L’Allemagne veut que le marché maintienne une place pour les moteurs thermiques alimentés par les « e-fuels« . C’est donc l’occasion de faire le point sur ces électro-carburants qui pourraient prolonger l’utilisation des moteurs actuels ?
De quoi s’agit-il ?
Le carburant de synthèse est issu d’un mélange entre du CO2 et l’hydrogène. On ne parle pas donc plus de ressource naturelle. Le CO2 est récupéré dans l’atmosphère. L’hydrogène est, de son côté, produit par électrolyse, c’est-à-dire, on sépare les molécules d’eau grâce à un courant électrique. Ce mariage donne naissance à du gaz ou du méthanol, eux-mêmes transformés en carburant de synthèse après un second raffinage. Avec cela, on obtient selon les besoins de l’essence du gazole, du kérosène ou de l’huile de synthèse. L’avantage est que tout ceci est conciliable avec un moteur thermique sans la moindre modification technique.
L’Allemagne, l’empécheur de rouler en rond
Évidemment, ce n’est pas un hasard si c’est l’Allemagne qui se distingue cette fois par une démarche a l’encontre de la volonté globale européenne. Au passage, notons que dans l’histoire de l’Union européenne, il n’est pas fréquent qu’un État fondateur annonce son abstention pour le vote d’une directive après que tous les gouvernements, le Parlement européen et la Commission européenne se sont accordés sur le contenu d’un texte souvent issu d’années de tractations. Au passage, notons que dans l’histoire de l’Union européenne, il n’est pas fréquent qu’un État fondateur annonce son abstention pour le vote d’une directive après que tous les gouvernements, le Parlement européen et la Commission européenne se sont accordés sur le contenu d’un texte souvent issu d’années de tractations.
Lobby et pression de « l’Alliance fuel »
Donc, pour en arriver là, on retrouve un intérêt économique très fort et l’action puissante d’un très grand groupe de pression. Il s’agit de « l’alliance e-fuel » constitué de constructeurs allemands qui veulent intensifier leurs efforts pour produire des carburants liquides de synthèse dont le bilan en CO2 est neutre. Grace a cela, le carburant de synthèse permettra à certains constructeurs, de continuer à commercialiser des modèles thermiques au-delà de 2035 en Europe. À partir de cette date, les véhicules devront consommer uniquement du carburant de synthèse. Comme par hasard, ce produit totalement dépourvu de pétrole et déjà élaboré en petites quantités par l’allemand Porsche et ses partenaires Siemens Energy et ExxonMobil. dans une usine pilote située au Chili.
Hélas, une production coûteuse et complexe
Cependant, tout n’est pas aussi simple. Tout d’abord, ce carburant ne signe pas définitivement les émissions de particules et de NOx même si la « pureté » supérieure du carburant de synthèse permet de réduire très légèrement les niveaux de pollution. En fait, on évoque un statut de carburant quasi-neutre en carbone, car le CO2 utilisé pour le produire est d’abord récupéré dans l’atmosphère. On estime donc que l’auto n’émet pas beaucoup plus de CO2 que ce que son carburant en a utilisé.
Une usine en Patagonie
Ensuite, il faut que la production elle-même du carburant consomment de l’énergie renouvelable pour offrir à ce carburant tout son intérêt écologique. C’est pour cela que Porsche et ses partenaires ont implanté leur usine pilote en Patagonie, où le vent souffle assez pour faire tourner les pales à pleine puissance 270 jours par an. Ce n’est pas forcément le cas partout.
On en arrive à un dernier écueil, la capacité de production. L’usine Porsche implantée en Chili sait produire 130 000 litres de carburant par an. Les prévisions de dévellopement permettrait de fabriquer 55 millions de litres dès 2025, puis 550 millions de litres en 2027 grâce aux 380 éoliennes prévues à terme. Ce n’est évidemment pas assez par rapport à la consommation mondiale. En 2020, rien qu’en France, on a consommé 42,55 milliards de litres de carburant routier malgré les confinements successifs !
Un litre d’e-fuel, combien ça coûte ?
Pour l’instant, c’est hors de prix, mais Porsche envisage à l’horizon 2030 le fixer a environ 2 $ par litre. Attention, tout ceci est annoncé hors taxes. Lesquelles représentent, sur les produits pétroliers en France, plus de 60 % du prix du carburant. Il va falloir donc convaincre les gouvernements d’accordés des incitations fiscales.
Peut-être que le but est un peu plus modeste. Avec cette prise de position à Bruxelles, les constructeurs haut de gamme comme Porsche, Ferrari, Lamborghini… Se donne une porte de sortie et ce n’est pas rien.
Crédit photo : Maxim Hopman