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Japon : 25 milliards pour enrayer la chute du taux de natalité

On s’extasie souvent devant les chiffres qui nous viennent du Japon. Les données économiques sont très souvent bonnes et de nombreux indicateurs comme celui de la criminalité sont bons. Il reste que cela ne semble visiblement pas poussé les couples à voir des enfants. La baisse du nombre de naissances dans l’archipel nippon bat des records. Le gouvernement a annoncé une série d’aides destinées à inciter les familles à avoir plus d’enfants.

Une tendance déjà ancienne

Ce n’est pas un problème nouveau, car depuis de nombreuses années, le taux de natalité au Japon est l’un des plus bas du monde. Chaque année marque ainsi une baisse consécutive. Le Japon, fort de 125 millions d’habitants, a enregistré moins de 800 000 naissances en 2022, le nombre le plus bas depuis que ces statistiques existent. Le poids démographique des personnes âgées a fortement augmenté. Ces données comprennent aussi les Japonais résidant à l’étranger et les étrangers résidant au Japon. Une triste et pas enthousiasmante nouvelle qui coïncide avec une autre donnée qui va dans le même sens.

Une mortalité et un vieillissement en hausse

En effet, le nombre annuel de décès, atteint des records et s’ajuste sur le plus haut depuis l’après-guerre. Par ailleurs, la hausse des cas de mort naturelle et de décès par pneumonie reflète cette réalité d’une société japonaise vieillissante. La diminution naturelle de la population en 2021 a été la plus importante jamais connue, dépassant pour la première fois le chiffre de 600 000.

25 milliards sur la table

Concrètement, le Premier ministre japonais, Fumio Kishida, a annoncé jeudi un plan de 25 milliards de dollars sur trois ans d’aides aux familles. Ces aides vont se repartir sur des augmentations d’allocations directes perçues par les parents, de l’aide financière pour l’éducation des enfants et les soins prénataux. Il est aussi question de faire avancer certaines pratiques comme la promotion d’horaires de travail flexibles et du congé parental pour les pères.

Pas sûr que cela suffise, ce plan a suscité des critiques. D’une part, les sources de financement ne sont pas vraiment bien déterminées et de nombreux spécialistes s’interroge sur le mode de financement de ces mesures. Cela impliquerait des réductions des dépenses au détriment d’autres postes du budget de l’État.

Un phénomène aux explications multiples

En fait, ce plan s’inquiète d’abord de l’aspect financier du problème. La première cause de cette natalité en berne est le coût de la vie, extrêmement élevé sur l’archipel. Le nombre de retraités augmente, tandis qu’il y a de moins en moins de jeunes actifs pour assumer le prix de ce vieillissement. L’impact économique de la sécurité sociale augmente donc pour les jeunes Japonais. Ils sont nombreux à considérer que faire un enfant serait trop difficile à supporter financièrement.

Une société très classique

Mais il reste des raisons structurelles et sociologiques, plus profondes. Tout d’abord, le taux de célibat très important des jeunes nippons. Depuis les années 1970, les jeunes Japonais se désintéressent du mariage, ils préfèrent rester chez leurs parents pour des raisons financières. La société japonaise est encore traditionnelle, les naissances hors-mariages sont mal vues et restent marginales.

Avec des rôles bien déterminés

Ensuite, la montée du célibat choque quelques principes de base de la société japonaise. La répartition des rôles en fonction du sexe est classique. En général, les maris apportent les ressources au foyer tandis que les femmes s’occupent de la famille et de la maison. Évidemment, les femmes célibataires doivent désormais travailler pour subvenir à leurs besoins. Or, au Japon, le sens du devoir vis-à-vis de son travail est très important. Il faut être très présent dans son emploi. Cela ne laisse pas beaucoup de temps pour des activités de loisirs et des rencontres. Dans ces conditions, il est évidemment difficile de fonder une famille.

L’émancipation par le travail

Pour finir, il se passe au Japon ce qu’il se passe-partout ailleurs, puisque les femmes travaillent plus, elles s’éduquent plus. Comme souvent, les changements sociologiques et de mentalité prennent plus de temps que les changements économiques. Traditionnellement, dans la société nippone, il est plutôt admis que les femmes doivent épouser un homme dont la situation leur est supérieure. Cela veut dire aussi bien en termes d’éducation que de revenus. La hausse du niveau d’études, d’emploi et de revenus pour de nombreuses femmes bloque donc certains hommes. Cela complique  la recherche d’un partenaire avec qui avoir des enfants.

Crédit photo : Beth Macdonald

 

 

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La Rédaction